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Conférence : Racisme et équité raciale – conscientiser le racisme écosystémique dans nos sociétés

Metropolis Virtual Summit (Nov. 12, 13 & 16) / Sommet Virtuel Metropolis (12, 13 & 16 nov.)


Racisme et équité raciale – conscientiser le racisme écosystémique dans nos sociétés

Date and time / Date et heure:11/13/20 11:30 AM-12:30 PM

Location / Lieu: voir le site du congrès (via Zoom)

Speakers / Conférenciers: Chantal Asselin, Paul R. Carr, Gina Thésée

Description: Le colonialisme a fait naître nombre de lois, traités et accords, dont plusieurs fondements et pratiques, guident encore nos actions. De là, les fondements racistes écosystémiques, tissés de manière intrinsèque, dans nos institutions et États contemporains. La pandémie nous permet d'y remédier.

Description longue de la conférence

Paru en 1853, l’Essai sur l'inégalité des races humaines du comte de Gobineau, d’origine française, l’acclame comme « père du racisme ». L’auteur, grand voyageur, s’exprimait en 5 ou 6 langues orientales et se défendait bien d’être raciste ou de promouvoir le racisme. Il racontait que les civilisations, ethnies ou races, comme on disait à son époque, et la connotation attribuée à ce dernier substantif, sont diverses, voire inégales, sans les connotations de jugement de valeur, fruits du colonialisme.

Il est clair que la sémantique du substantif race, ne date pas de l’après-fascisme du XXème siècle.

L’auteur affirme que les « races » se trouvent non comparables entre elles, surtout « en termes d'une ligne droite unique, où les uns seraient plus arriérés et les autres plus avancés » selon un destin évolutif unique et positiviste, comme le proclame le mythe du progrès au siècle des Lumières.

Dans ses Nouvelles Asiatiques, œuvre publiée en 1855, le comte de Gobineau vise à identifier les différences entre les races humaines, « toutes couleurs de peau confondues, toutes religions, coutumes et philosophies mêlées ». L'ouvrage présente l'un des plus grands mythes du racisme contemporain : le mythe aryen. Il en fait voir de « toutes les couleurs » aux lecteurs, en prenant appui sur la linguistique, l’Ancien Testament, l’archéologie et la littérature de son époque. Il élabore sur les civilisations antiques.

Il relève trois races : les Noirs, les Jaunes et les Blancs. Il indique que ces dernières se trouvent complémentaires dans l’Histoire. Il analyse chacune, ses succès et ses échecs, et leur impose une hiérarchie. « Aussi, les Blancs trouvent « naturellement » leur place au sommet du fait qu'ils représentent à ses yeux [de Gobineau] le principe vivifiant mettant en contact les races et permettant la civilisation ».

Le colonialisme a fait naître nombre de lois, de traités et d’accords, dont plusieurs fondements et pratiques, guident encore de nos jours, nos actions. De là, les fondements racistes systémiques, voire écosystémiques, puisque tissés de manière intrinsèque, dans nos institutions contemporaines.

Le simple fait d’énoncer, d’admettre ces fondements, à l’intérieur de nos pratiques étatiques et organisationnelles, constitue en une étape incontournable pour les extraire de nos pratiques, si telle est la volonté de nos sociétés contemporaines. Or, la politique, le pouvoir et l’argent, mis de l’avant, peut nous conforter autant collectivement qu’individuellement.

« Cessons d’être naïfs et comprenons que le système capitaliste dans lequel nous vivons est né de la division de l’humanité imposée par l’idéologie de la race comme marqueur social. En Libye, lorsque des migrants[1] sont vendus comme l’étaient nos ancêtres, cela émeut un temps mais personne, et surtout pas la France, qui s’auto proclame patrie des droits de l’homme, ne mène campagne auprès de la communauté internationale pour que cette ignominie cesse. Au contraire, elle continue de vendre des armes[2] à l’un des camps revendiquant le pouvoir. A croire que ceux qui pensent le capitalisme ne voient toujours pas le lien pervers et mortifère qu’il y a entre noir et esclavage, entre noir et race et entre race et classe » (Fanon-Mendez, 2020).

Au XXème siècle, Adolf Hitler arrive au pouvoir. Bien qu’il n’ait pas inventé le concept de la supériorité de la race aryenne, il l’a extrait de l’Histoire universelle[3] et poussé à l’extrême pour servir son idéologie et ses intérêts.

Donc, l’histoire du racisme, embué dans l’esclavage et la domination de l’autre, la haine, l’ignorance et les jeux de pouvoir, traverse des civilisations, des contextes, des empires et, il faut le dire, les langues.

Pourquoi le Premier Ministre du Québec refuse-t-il de confirmer la présence de racisme systémique au Québec ? Pourtant, il accepte de présenter ses excuses…[4]

« On voit bien, dès lors, que les réparations sont un processus politique qui force à analyser les éléments fondateurs du capitalisme et de la mondialisation et de leurs conséquences sur les personnes racisées » (ibid)

Dès lors, comment détruire ces pratiques? Comment arriver à se compléter comme représentants de toutes les couleurs? Comment tisser la trame de nouvelles relations complémentaires, sans hiérarchie? Sans oligarchie? Sans anarchie? Où chaque humain, peu importe sa couleur, sa langue, sa religion, y trouve sa place par ses savoirs, savoir-faire et savoir être?

Comment guérir les âmes blessées? Les couleurs pulvérisées? Supprimées?

Et pourquoi peut-on dire ou présenter ou constater que le racisme n’existe pas quand il y a tellement de preuve, d’expérience vécue par les gens racialisé, et de recherche qui confirme que c’est un fait. S’il s’agit d’une question linguistique, devrait-on rejeter d’autres concepts comme la « nation québécoise, » la « souveraineté, » « les droits linguistiques, » etc. ? De plus, est-ce que c’est crédible que les « blancs » annoncent au monde que le racisme systémique n’existe pas ? Quelle serait la réaction si les hommes annonçaient au monde que le sexisme n’existait pas ?

Sur quels fondements prennent appui les prétendus concepts positivistes ou néopositivistes énonçant que telle personne se trouve supérieure ou inférieure à une autre?

Qui a dit que Christophe Colomb a découvert l’Amérique? Les « indiens » ou « Peaux-Rouges » s’y trouvaient pourtant fort bien avant son arrivée, par des milliers d’années !

« Dès 1492, avec l’arrivée des premiers colons, le pillage des ressources, le vol des terres, le meurtre des indigènes et l’installation de comptoirs, le tout avec l’appui des monarchies de l’époque. Les fondations de la mondialisation étaient posées. D’autres, telles que des banques comme la JP Morgan Chase, le Crédit suisse et la Banque de France s’y sont joints aux XIXème et XXème siècles. Les produits dont bénéficiaient les populations de territoires souverains ont été acquis par la violence des nouveaux barbares ; leurs ressources naturelles suscitaient intérêt et envie car elles enrichissaient ceux qui en rapportaient. Ainsi, pour rapporter toujours plus à leur roi respectif, les colons meurtriers ont justifié, dès le XV siècle, la mise en esclavage, autorisant ainsi à n’utiliser des êtres humains que pour leur force de travail désincarnée afin que la différence entre force de travail et travail soit annihilée de façon à ce que la plus-value génère le maximum de profit pour les colons. Le système capitaliste fondait ainsi ses premières bases » (ibid).

Mais qu’a donc découvert Amerigo Vespuci? Comment les colonialistes blancs ont-ils survécu au scorbut? À quelles personnes se sont-ils adressés pour bénéficier des savoirs, savoirs faire, voire même savoir être, qui leur a sauvé la vie? Leur ont-ils demandé ou écarté de leur vue à cause de la couleur de leur peau?

Comment donc, interpréter notre Histoire?

« Force est de constater qu’à l’heure actuelle, aucune institution multilatérale ne demande des réparations pour les crimes contre l’humanité et de génocide commis lors de traite transatlantique négrière, de la mise en esclavage et du colonialisme. Les États savent très bien que demander des réparations pour ces crimes, ou accepter que des organisations ou des États en demandent, les forceraient à questionner les structures du système dominant, ce qui dans le système capitaliste libéral blanc est impossible » (ibid).

Comment se comporter dans nos États, établissements et organisations? Georges Floyd a tenté vainement de nous indiquer la réponse. La réponse internationale démontre qu’on est très, très loin d’une société qui ne voit pas la race (la cécité ou la « colour-blindness »).

« Prenons la police, si elle s’autorise à commettre des crimes à l’égard des corps noirs – j’inclus aussi les Arabes – , c’est bien que ce racisme est profondément ancré dans l’inconscient collectif de nos sociétés le racisme structurel qui fonctionne comme un système –il n’y a qu’à étudier le nombre d’incarcérations, de personnes sans emploi, mal logées, mal soignées, le nombre de jeunes sortant du système éducatif, le nombre de pays dont les richesses sont pillées et dont les peuples vivent dans une grande pauvreté pour comprendre, si on le veut bien, que c’est bien la présence dans l’idéologie prônée par le capital et la financiarisation du monde, d’une perception dominante des Êtres sur les Non Êtres » (ibid).

Joyce Echaquan a eu le courage de filmer sa propre réponse. Était-il un cas isolé ou un cas capturé qui peut maintenant mettre la lumière sur une situation, un contexte, une relation qui est malade ?

D’ailleurs, Guo (2009, 2010, 2013, 2015) explicite le processus parfois subtil, de racisme dans les milieux de travail contemporains. Son analogie avec les « barrière, porte et plafond de verre » illustrent ces pratiques. Thésée (2017) ajoute le plancher de verre.


Comment extraire ces pratiques racistes écosystémiques, puisqu’ancrées dans nos pratiques à travers l’Histoire universelle jusqu’à maintenant, sous diverses formes, dans les milieux de travail, les hôpitaux, et les services à la collectivité comme ceux des policiers? En cette période pandémique, « [u]ne planification minutieuse est également requise pour les milieux fermés ayant un nombre important de personnes vulnérables, tels que les établissements de soins de longue durée et les prisons, pour réduire au minimum le risque d’exposition et gérer les résidents et le personnel malades. Les gouvernements [fédéral, provinciaux et territoriaux] doivent aussi s’attaquer à l’accès aux soins de santé pour les personnes n’ayant pas d’assurance-maladie, y compris les migrants illégaux »[5]. Selon le recensement de 2016 au Canada, Statistiques Canada précise que 29,9% des personnes agissant comme aides-infirmiers, aides-soignants et préposés aux bénéficiaires étaient noires, tandis qu’un pourcentage identique de personnes était d’origine philippine. Ainsi, toutes ces personnes, soit 59,8% des personnes pratiquant ces professions, représentaient des minorités visibles, tandis que seulement 14.6% de ces personnels étaient des personnes immigrantes, ne faisant pas partie de telles minorités (ibid). « Le quart de ces travailleurs immigrants avaient au moins un baccalauréat, comparativement à 5 % pour le reste de la population » (Meloche-Holubowski, 2020)[6].


Les descendants des empires coloniaux impérialistes (et ceux qui les ont précédé dans l’Histoire universelle) ont-ils le courage de casser ces effets du « quadruple obstacle de verre invisible » (Thésée, 2017) sur les minorités visibles du Canada, et d’ailleurs? Ces descendants osent-ils cesser de freiner l’intégration professionnelle de personnes immigrantes dans nos contextes de racisme écosystémique, et de perpétuer ainsi, l’enfoncement de l’Humanité, en se privant de nombre de ses ressources humaines, pourtant riches?

« Pour conclure, si l’on veut mettre fin au racisme structurel et systémique ainsi que le prétendent de nombreux gouvernants ou de responsables d’institutions internationales, il va sérieusement falloir qu’ils acceptent d’interroger les structures de la mondialisation et du capitalisme à la lumière de la race et de la classe surtout qu’à la suite de la crise financière de 2008, on comprend que le capitalisme n’est pas victime d’une crise momentanée mais d’une contradiction interne qui le conduit à son effondrement inexorable. Ne peut-on légitimement se demander si cette contradiction ne repose pas sur la volonté de laisser dans la zone de Non Êtres des millions de personnes et particulièrement depuis que ceux qui occupent les fonctions de domination ont voulu prouver, par la violence et la barbarie, qu’ils étaient les seuls à devoir bénéficier des profits tirés du capital en mettant en place un système racial humainement indigne » (Fanon-Mendez, 2020) ?

Comment amorcer et soutenir le dialogue sur le racisme, maintenant ? Quels sont les enjeux pour les gens, les personnes racisées, pour les institutions et surtout pour l’éducation, qui doit négocier les relations sociétales ? On ne naît pas raciste, on le devient, car cela s’incruste dans nos systèmes nos institutions, nos cultures, nos valeurs, depuis plusieurs années, siècles, millénaires… L’éducation, l’éducation à la citoyenneté et l’apprentissage de l’Histoire Universelle nous semble l’intermédiaire pour amoindrir ces gestes, comportements, attitudes, pratiques, politiques, programmes et manières d’être.

La pandémie nous présente l’occasion d’éviter enfin, de revenir en arrière, en réinventant nos sociétés actuelles. Nous allons aborder ces questions dans cet atelier.

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